#91 Le massacre des petits-enfants de Clovis : Parce qu'ils ne le valaient pas bien (apparamment)

Aujourd’hui c’est vendredi. Et le vendredi, soit on grimpe 4 étages à mains nues pour sauver un enfant, soit on lit « La petite histoire de l’Histoire »

Comme moi j’ai le vertige, j’ai le plaisir de te présenter l’épisode n° 91 consacré à un moment peu glorieux de l’histoire des Mérovingiens, tu sais les rois pleins de cheveux qui ont succédé à Clovis. Eh ben ses enfants à Clovis, ils ont fait des choses pas jolies-jolies.

Et pour ne pas trop te démoraliser, je finirais l’article par une petite liste marrante des amendes prévues par la loi Salique à l’époque. Ca changera des enfants morts…

Mes petits amis du 21e siècle, la machine a remonter le temps a prévu ses ciseaux de coiffeur, direction l’année 833. Allez, c’est parti !

Où sommes nous ?

Ambiance un peu tandax quand nous arrivons dans ce beau palais de l’Ile de la Cité, dont le propriétaire n’est autre que Childebert, roi de Paris et fils du grand Clovis. En effet, dans un coin, 3 enfants sont recroquevillés, effrayés. Ils ont 10 ans, 7 ans et 4 ans, et ne sont autre que les neveux de Childebert.

A l’autre bout de la pièce, le roi de Paris discute vivement avec son frère, Clotaire, roi de Neustrie qui semble bouillir de l’intérieur. Sans entendre ce qu’ils se disent, on devine que le destin des enfants est en jeu. Un messager entre dans la pièce et remet un billet aux deux rois. Le sort des enfants est scellé. Que se passe-t-il au juste ? C’est ce que nous allons voir.

Une dure lutte de pouvoir

Pour comprendre cette situation, il faut remonter à 524. A cette date, le 2e fils de Clovis, Clodomir, roi d’Orléans, meurt près de la Tour du Pin en Isère lors d’un combat contre les Burgondes. Il laisse une veuve éplorée, Gontheuque, et 3 enfants encore trop jeunes pour régner.

Cet événement va attiser les convoitises des autres fils de Clovis, qui loin de pleurer la mort de leur frère, vont rivaliser de fourberie pour lui chourer ses territoires. Ainsi, Clotaire fonce droit sur Orléans, et épouse de force Gontheuque afin d’obtenir des droit sur le royaume de Clodomir.

Les 3 enfants, eux, trouvent refuge non loin de Paris auprès de leur grand-mère, la veuve de Clovis : Clotilde. Clotaire, fou de rage de ne pas pouvoir s’assurer de conserver le royaume d’Orléans une fois les enfants majeurs, rejoint son frère Childebert à Paris, qui lui aussi a bien envie de croquer un bout du Royaume d’Orléans. Bon, les 2 kassos vont mettre quelques années à finaliser leur plan machiavélique, mais ils ne vont pas faire les choses à moitié.

Ainsi, en 533, ils envoient un SMS à leur mère, Clotilde pour lui dire qu’ils souhaitent inviter les 3 enfants de Clodomir à Paris afin de reconnaître leurs droits sur le royaume d’Orléans. Clotilde, ravie de cette nouvelle, habille les enfants comme pour les grands jours et les envoie sans s’inquiéter chez leur oncle. Seulement à peine arrivés, les enfants sont capturés et une story Snapchat est envoyée à Clotilde pour lui révéler les vraies intentions de Clotaire et Childebert : « Que penses-tu qu'il faut faire des enfants? Donnes tu l'ordre de les laisser vivre avec les cheveux coupés ou de les égorger tous les deux?" Alors là comme ça, la réponse nous semble évidente… Mais pour Clotilde, c’est un crève-cœur. Il faut savoir qu’avoir les cheveux tondus pour un Mérovingien, c’est la honte ultime, la h’chouma absolue.

Le cœur lourd, Clotilde ne peut se résoudre à voir ses petits enfants déshonorés et répond simplement « Plutôt morts que tondus ». Sobre et efficace… Mais pas hyper gay-friendly.

Quand ils reçoivent la réponse de Clotilde, les 2 frères comprennent ce qu’il leur reste à faire. Childebert poignarde l’aîné en plein cœur, qui meurt dans un râle. Le cadet, 7 ans, se jette aux pieds de son oncle et l’implore de lui laisser la vie sauve. Childebert est pris de pitié devant tant de larmes, il se tourne vers Clotaire et lui propose de lui laisser sa part du Royaume d’Orléans en échange de la vie de l’enfant. Mais Clotaire est impassible (et un peu un gros connard) : il rappelle à son frère que c’est lui qui a eu cette idée. Childebert repousse l’enfant qui vient s’empaler sur l’épée de Clotaire. Celui-ci achève le pauvre gosse en l’étranglant.

Au 2e plan, le Clodoald se carapate hyper discrètement sur le dos de Superman

Quand au 3e enfant, Clodoald, il a dû mater « Insaisissable » car il a disparu du château. Ses oncles ne le retrouveront jamais. Devenu adulte, il fondera un monastère en région parisienne, lui donnant son nom : Saint-Cloud.

Allez, maintenant qu’on a bien rigolé avec le meurtre de deux enfants, et qu’on a vu que les Mérovingiens ne plaisantait pas avec l’honneur et les cheveux, je te propose un petit retour plus léger sur la loi Salique en vigueur à cette époque. En gros, il s’agit d’un ensemble de textes qui visent à définir les réparations financières en cas de crime, pour éviter les vengeances personnelles. Mais on parle uniquement de thunes, pas de prison. Donc, tu peux latter qui tu veux du moment que tu peux payer. Si tu n’as pas l’argent pour indemniser la victime, là par contre, ça craint du boudin pour toi.

Voici quelques exemples d’amendes un peu chelou voir carrément dingue pour nous en 2018 (pour t’aider à te faire une idée des tarifs de l’époque, un bœuf coûte 2 sous et un cheval 12) :

• Tuer un esclave coûte 35 sous, un artisan 62 sous, un homme libre 200 sous, un noble 600 sous, un évêque 900 sous (du coup, vaut mieux tuer 25 esclaves, ça coûte moins cher)
• Une plaie au crâne coûte 30 sous, mais si on voit la cervelle, l’amende passe à 45 sous
• Un coup dans les côtes ou un coup de poignard dans le ventre coûte 30 sous + 5 pour les soins
• L’arrachement du nez, d’un pied, œil ou main coûte 100 sous, sauf si la main pend encore : 63 sous
• Traiter quelqu’un de renard ou de lapin : 3 sous
• Accuser quelqu’un d’avoir jeté son bouclier sans en apporter la preuve : 3 sous
• Si un homme libre touche la main d’une femme libre : 15 sous
• Une femme adultère qui quitte le foyer conjugal est enterrée vivante dans la boue. 

Alors ben du coup, si ta femme te trompe, qu'elle te traite de renard, te donne un coup dans le côtes, et touche la main d'un autre mec : ben PAF : jackpot !

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Le mois prochain, dernier article de la saison! Et j'aurais du lourd. Du très très lourd!